PR Daniel Rivière

Numéro 7, septembre 2017

Service d’exploration de la fonction respiratoire et de médecine du sport, clinique des voies respiratoires au CHU de Toulouse.

Professeur Rivière, vous êtes un spécialiste de l’activité physique chez le sujet âgé. En quoi faire du sport préserve-t-il le cerveau et les muscles du corps humain ? Quel est le fonctionnement du mécanisme ?

Plutôt que le terme « sujet âgé », je préfère employer, le terme plus générique de personnes avançant en âge, car la définition « officielle » d’un « sujet âgé », c’est d’avoir 65 ans. Mais actuellement, à 65 ans, nous sommes beaucoup plus jeunes qu’auparavant.
Chez les personnes avançant en âge avec un vieillissement normal, nous constatons une perte de masse musculaire, la sarcopénie. Nous savons aujourd’hui que l’activité physique, et en particulier les exercices de renforcement musculaire, est particulièrement bénéfique contre la perte de muscles. L’activité physique permet de maintenir le capital musculaire, la force musculaire et donc éviter la dépendance, par exemple lorsqu’une personne ne peut plus marcher ou ouvrir seule un bocal de cornichons. Il existe une bibliographie scientifique abondante au sujet de l’activité physique, des muscles striés squelettiques(1) de l’appareil locomoteur, je ne reviens pas dessus.
En ce qui concerne le cerveau, il faut se référer à des travaux notamment réalisés en EHPAD (Établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) sur des personnes dépendantes. Il est montré que l’activité physique a des effets grâce à l’ensemble des modifications cardio-vasculaires et métaboliques qu’elle entraîne puisqu’elle va jouer sur tous les systèmes et va forcer le cerveau à les gérer. Elle peut avoir un effet spécifique sur le cerveau mais nous ne savons pas encore précisément par quels types de substances : certains parlent de l’endorphine, d’autres de la sérotonine… Il semblerait évident que l’activité physique régulière ralentit le déclin cognitif et permet également pour certains une amélioration de leur état. Des travaux menés à Toulouse, en particulier par Bruno Vellas et Yves Rolland(2), ont montré un rôle très positif de l’activité physique dans les démences de type Alzeihmer. C’est un cercle vertueux : plus l’activité physique fait du bien au cerveau, plus la personne a envie d’être mobile, donc plus elle va faire de l’activité physique et plus cela sollicitera et permettra de maintenir le capital musculaire.
Actuellement il ne semble pas qu’il y ait un seul organe ou un seul système du corps humain qui ne bénéficie pas de la pratique d’une activité physique régulière, sous réserve que ce soit quand même une activité raisonnée, régulière, raisonnable. L’activité physique est bénéfique pour absolument tous les systèmes et en particulier pour le cerveau et les muscles striés squelettiques qui nous permettent de nous mouvoir.

Quels sont les niveaux d’activités physiques et sportives (APS) recommandés pour la santé pour des personnes âgées ?

Ils ont été réévalués très récemment. L’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a fait une révision des repères d’activité physique pour la santé(3) dans le cadre du nouveau Programme National Nutrition Santé(4) (PNNS). Pour les personnes avançant en âge, les recommandations sont de faire quatre types d’exercice.
Le premier, à la base de l’activité physique, consiste à pratiquer des activités physiques sollicitant l’aptitude cardio-respiratoire. Il s’agit d’en faire 30 minutes par jour, au moins 5 jours par semaine à intensité modérée ou 15 minutes par jour, 5 jours par semaine à intensité élevée. Il est également possible de faire des combinaisons : 2 minutes à intensité modérée équivalent à 1 minute d’intensité élevée.
Le deuxième type d’exercice recommandé est le renforcement musculaire. Les recommandations de l’Anses sont, selon moi, un peu trop précises car elles sont difficiles à mettre en oeuvre chez les personnes avançant en âge. Il s’agit de faire 8 à 10 exercices répétés 8 à 12 fois chacun. Par exemple, si vous pliez l’avant-bras sur le bras en prenant une bouteille d’eau d’1,5 litre (cela correspond à un haltère d’1,5 kg), vous devez le faire 10 fois pour faire travailler le groupe musculaire. Il est conseillé de faire du renforcement musculaire 2 fois par semaine mais de préférence non consécutifs.
Comme il s’agit de personnes avançant en âge, il est également recommandé des exercices de souplesse comme des étirements, des assouplissements ainsi que des exercices d’équilibre.
Voilà les recommandations en termes d’exercices. Mais le point fondamental à ne pas oublier, c’est qu’il faut les faire en plus des activités réalisées dans la vie quotidienne.
La base est de lutter contre la sédentarité. Il ne faut surtout pas croire que parce que vous avez fait 30 minutes d’exercice cardio-vasculaire, vous pouvez passer 8 heures assis dans le canapé à regarder la télévision, cela ne se compense pas. Le principe est de trouver tous les moyens de bouger : par exemple, actuellement pour cette interview par téléphone, je vous téléphone en marchant dans le bureau. De plus en plus d’entreprises mettent en place des possibilités de travailler debout(5). Autre exemple : préférer systématiquement l’escalier à l’ascenseur. Lorsque je fais des présentations, je montre une pyramide dont la base est la lutte contre la sédentarité, puis au-dessus les exercices cardio-vasculaires, le renforcement musculaire et au sommet les autres exercices, de souplesse et d’équilibre.

Justement, que faire à domicile pour lutter contre la sédentarité, notamment une fois à la retraite ?

Réaliser les exercices de souplesse à domicile ne pose pas de problème. Pour les exercices d’équilibre, vous pouvez être debout les yeux ouverts puis fermés, marcher le long d’une ligne au sol éventuellement en faisant une double tâche, par exemple marcher et compter en même temps. Le renforcement musculaire à domicile est d’une facilité déconcertante. Quand vous vous asseyez sur une chaise et que vous vous levez 10-12 fois, ou quand vous vous appuyez contre un mur et que vous pliez et repliez les bras, vous faites du renforcement musculaire. Le plus difficile à réaliser au domicile, ce sont les 30 minutes d’activité physique cardio-vasculaire à intensité modérée ou les 15 minutes à forte intensité, car cela correspond plutôt à de la marche, du vélo, de la natation. La personne peut toujours acheter un vélo ou un rameur d’appartement mais l’expérience m’a montré qu’il y a beaucoup de vélos d’appartement dans les caves et les greniers.
Concernant plus spécifiquement la lutte contre la sédentarité, un retraité peut se lever toutes les heures, monter et redescendre l’escalier s’il y a un étage chez lui, aller marcher… tout dépend du niveau de santé de la personne.
Il ne faut pas oublier que les activités physiques et sportives sont aussi un très grand facteur de socialisation, en particulier chez les personnes âgées. L’intérêt c’est que les retraités fassent quelques exercices chez eux (renforcement musculaire, travail de l’équilibre et de la souplesse) et qu’ils sortent pour aller faire de l’activité physique seul ou en groupe. Souvenez-vous de la définition de la santé par l’OMS : « la santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité»(6). C’est pour cela que les activités physiques et sportives sont intéressantes : si vous appartenez à un club ou à une fédération sportive, il y a également la dimension de santé sociale.

À quoi doit s’attendre une personne ayant régulièrement pratiqué une activité physique et sportive, avec l’avancée en âge ? Sera-t-elle vraiment « entretenue » et « préservée » ?

Oui, l’action de prévention primaire de l’activité physique est fondamentale. Si vous faites régulièrement de l’activité physique en étant jeune, vous bénéficiez d’une prévention cardiovasculaire et d’une prévention de toutes les maladies métaboliques (obésité, surpoids…) en avançant en âge. Les femmes ont une déminéralisation plus marquée que les hommes, surtout à la ménopause. Elles risquent de tomber dans la déminéralisation pathologique (ostéoporose). Elles ont donc intérêt à faire de l’activité physique pour acquérir et maintenir un capital osseux relativement confortable. Quand elles auront une déminéralisation du capital osseux, elles partiront d’un niveau plus élevé et auront de fortes chances de ne pas être atteintes d’ostéoporose. La prévention de l’ostéoporose chez la femme passe par de l’activité physique régulière.
Sur le plan cognitif, l’activité physique prévient la dépression, l’anxiété, et la dernière chose mise en évidence plus récemment, c’est qu’elle prévient la survenue de certains cancers et diminue la mortalité des cancers tous cancers confondus. Chez les personnes ayant eu un cancer et tout particulier un cancer du sein, l’activité physique prévient le risque de récidive.
Il est évident que quelqu’un qui aura fait de l’activité physique régulière, raisonnée et raisonnable aura davantage de chances d’avoir une vieillesse totalement réussie, ce que les Américains appellent « successful aging ».
Cette réponse est faite en tenant compte de tous les facteurs confondants, c’est-à-dire tabagisme, alcool, etc. L’activité physique a un effet de prévention primaire, empêchant l’apparition de maladies qui théoriquement sont des maladies se manifestant avec l’âge.
L’activité physique en prévention primaire permettra à des gens de vieillir plus longtemps et en bonne santé. On finira par mourir en « bonne santé » de vieillesse à 95 ans ou plus tard !

Peut-on espérer les mêmes bénéfices d’une activité physique qu’à 30-40 ans ?

C’est une très bonne question. Si vous ne faites rien à partir de 20 ans, vos capacités physiques déclinent. Au bout d’un certain temps, vous allez atteindre un niveau fixé par les gériatres, qui s’appelle le seuil de dépendance. Vous êtes dépendant et ne pouvez plus faire seul les actes de la vie quotidienne : vous pouvez difficilement conduire, avez besoin d’aide pour porter les sacs…
Quel que soit notre niveau d’activité physique, nous tendons tous vers cela si nous ne faisons pas d’activité physique. Quel que soit l’âge auquel nous démarrons une activité physique, nous ralentissons cette décroissance. En d’autres termes, vous aurez plus de bénéfices si vous commencez à 30 ans qu’à 65 ans. Mais si vous commencez à 65 ans, vous aurez encore des bénéfices. Il n’y a pas d’âge pour ne pas commencer. Il ne faut pas se dire « j’ai 65 ans, c’est fini pour moi, je regarde la télévision », ce n’est pas vrai !

Que pensez-vous du cas de Robert Marchand (cycliste centenaire) ?

Très peu de gens sont capables de faire du 20km/h à vélo à 103 ans !
Robert Marchand(7) est quelqu’un d’exceptionnel, tout le monde ne peut pas faire ça. Il a fait du vélo toute sa vie et il a des aptitudes physiques qui font qu’il peut continuer à faire des courses.
Un autre exemple : Fauja Singh(8) a couru le marathon à 101 ans !
Selon moi il va y avoir de plus en plus de gens « exceptionnels » : je suis persuadé que dans 15 ans, une vingtaine de centenaires seront capables de faire du 20 km/h dans un vélodrome. Ils ont eu une vie saine, une pratique régulière d’activité physique, une alimentation équilibrée, un travail qui ne les a pas usés physiquement ou mentalement. C’est l’exemple même de ce que nous disions précédemment : faire de l’activité physique en continu et dès sa naissance.
Soyons clairs, ils ont quand même des aptitudes particulières. Nous ne naissons pas égaux, certains n’arriveront pas à cette performance même avec de l’entrainement.

Pouvez-vous nous parler de la règle des 3 « R » ?

Cela signifie une activité physique raisonnée, régulière et raisonnable.
Pourquoi ça s’appelle la règle des « 3 R » ? Parce que je m’appelle Rivière et que j’ai pris la première lettre de mon nom ! J’en plaisante en disant qu’un professeur des universités veut laisser son nom à la postérité ! J’ai donc pensé créer la règle de Rivière. Puis j’ai trouvé que cela manquait de modestie alors j’ai pris la première lettre de mon nom et fait la règle des « 3 R ». J’aurais pu faire la règle des « 3 P », c’est-à-dire personnalisée, permanente et progressive.
Tout d’abord que signifie une activité physique raisonnée ? Il est intéressant, en particulier pour les personnes âgées qui reprennent une activité physique après une longue interruption ou qui veulent se mettre régulièrement à l’activité physique, qu’elles aient en amont un examen médical. Le médecin doit vérifier les deux principales fonctions qui risquent de poser problème chez les personnes âgées : le coeur et l’appareil locomoteur.
Le médecin doit également vérifier s’il n’y a pas quelque chose à corriger avant de faire de l’activité physique. Supposons une personne de 65 ans en surpoids, qui se dit que cela ne peut plus durer et souhaite faire une activité physique. Le médecin l’encourage dans ce sens sans plus de vérifications : si elle va courir, cela va tirer sur sa sangle abdominale « faible » et sur les muscles dorsaux, elle va avoir mal et se dire « ce médecin est nul, j’arrête ». Il y a une préparation à la reprise dans certains cas qui passe par du renforcement musculaire chez un kinésithérapeute.
Ensuite, l’activité doit être choisie en fonction des goûts de la personne, il ne faut rien imposer. Nous entendons souvent « l’activité la plus simple c’est la marche, allez marcher !». J’ai eu un patient à qui j’ai dit cela et qui m’a répondu « Marcher ? Seul ? Pour aller où ? ». Il faut choisir une activité qui plaise. La commission médicale du Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF) a mis en place le médico-sport santé(9) où un grand nombre de fédérations proposent des activités adaptées aux personnes avançant en âge. Elles peuvent donc trouver une activité ludique qui leur plaît.
L’intérêt n’est pas de dire seulement aux personnes de faire de l’activité physique, c’est trop facile et peu constructif. Il existe désormais une loi sur la prescription d’une activité physique pour les personnes en ALD(10) : prescrire de l’activité physique c’est relativement facile, il suffit de quelques heures de cours pour que le corps médical sache en prescrire. Par contre, que la personne continue l’activité physique et lutte contre la sédentarité en permanence, c’est une modification de comportement et ça, c’est beaucoup plus difficile !
« Raisonnée », c’est donc s’assurer qu’il n’y a pas de danger, s’assurer qu’il n’y ait pas une articulation ou un groupe de muscles qui fonctionnent mal, choisir une activité physique qui plaise à la personne et l’orienter : lui donner des conseils sur l’intensité de l’activité à faire, discuter avec elle de la fréquence des séances, du moment où elle va le faire. C’est s’adapter à la personne : un médecin ne peut pas donner à tout le monde la même fiche d’activité physique.

Ensuite, « régulière », c’est un point évident. Cela reprend les recommandations stipulant qu’il faut essayer de faire de l’activité physique au moins 5 fois par semaine. Si ce n’est pas possible, la personne doit garder une fréquence régulière. Beaucoup de gens me demandent « Il est recommandé de faire de l’activité physique modérée pendant 30 minutes 5 fois par semaine, soit 150 minutes. Si je fais 150 minutes d’activité physique modérée samedi et dimanche, est-ce que cela marche ? ». Moins bien ! Il vaut mieux faire 30 minutes 5 fois par semaine(11).
Enfin « raisonnable », c’est apprendre à la personne à faire de l’activité physique. Lui expliquer qu’avant de marcher, nager ou faire du vélo, il faut s’échauffer. Et que plus on avance en âge, plus on doit s’échauffer. Il ne faut pas fixer d’objectifs inaccessibles. Dire à quelqu’un « si vous n’arrivez pas à faire 30 minutes d’activité physique par jour, ce n’est pas la peine, cela ne sert à rien, ne faites rien », c’est idiot. Dès que vous bougez, il y a un bénéfice. Si la personne n’arrive pas à pratiquer 30 minutes mais 15 minutes, les fois suivantes, elle arrivera progressivement à pratiquer 20 minutes, puis 30 minutes. Et après la séance, il y a la récupération active : on ne s’arrête pas brutalement, on ne se jette pas sur le canapé, on marche, on fait des exercices d’assouplissement et éventuellement d’étirements.

Vos recommandations inscrites dans le rapport « Dispositif d’activités physiques et sportives en direction des âgés » de 2013 ont elle été suivies ?

Pas beaucoup, mais je ne critique personne. D’une part, il y avait des recommandations impliquant des financements et nous sommes dans une période où il est difficile de trouver des budgets pour certaines actions. Par exemple, nous étions précurseurs : nous avions proposé une prise en charge de l’activité physique pour des personnes en ALD. Depuis, il y a eu le décret sur la prescription mais la prise en charge ne se fait pas par l’Assurance maladie, uniquement par certaines mutuelles ou grâce à d’autres modalités de financement (dont les collectivités territoriales).
Également, et c’est l’opinion du groupe coordonné car je n’étais pas seul à émettre les recommandations, tous les intervenants impliqués devraient pouvoir travailler ensemble. L’expérience montre qu’il y a encore en France un certain nombre de corporatisme et que chacun pense qu’il est meilleur que l’autre pour s’occuper des personnes âgées.
Certaines recommandations ont été suivies, en particulier par les collectivités territoriales qui ont repris le rapport pour essayer de mettre en place des partenariats : par exemple, lorsque les clubs sportifs n’utilisent pas leurs équipements, ils les mettent à disposition de sujets retraités ou de clubs du 3ème âge.
Je ne peux pas dire que je suis déçu, car ce n’est pas le premier rapport qui est peu suivi d’effets. Et puis parfois, nous sommes surpris des effets d’un rapport. Je pense au PNNS. Lorsqu’on demande aux personnes ce que le PNNS recommande, ils répondent « Cinq fruits et légumes par jour ». Je suis un peu triste car j’ai l’impression que c’est la seule chose qui a été retenue. Lors d’une conférence, quelqu’un m’a dit : « je suis chômeur avec cinq enfants, je n’ai pas les moyens de manger cinq fruits et légumes par jour donc je vais forcément être malade. Qu’est-ce que vous allez faire pour moi ? ».
C’est pour cela qu’il faut prêter très fortement attention au message que l’on veut faire passer.

Pour le rapport « Dispositif d’activités physiques et sportives en direction des âgés » de 2013(12), certaines propositions ont été reprises dans les rapports postérieurs ou dans des groupes de travail plus spécifiques. Nous avions travaillé sur tous les publics âgés : âgés en bonne santé, âgés fragiles – c’est-à-dire ceux qui risquent de tomber dans la dépendance – et les porteurs de pathologies chroniques.
J’ai l’impression que ce rapport a été plus utilisé par les collectivités territoriales car c’était plus facile à mettre en oeuvre à l’échelon local qu’au niveau national. Nous avions conseillé que les éducateurs sportifs se déplacent dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). La classification relative aux groupes iso-ressources (GIR) mesure le niveau de dépendance des personnes : les personnes classées GIR 1 et 2 sont très dépendantes. Par contre, les personnes classées GIR 4 ou 5 peuvent faire un certain nombre de choses. Jusqu’à présent, il n’y avait que des kinésithérapeutes dans les EHPAD. Nous proposions que l’éducateur sportif aide le kinésithérapeute – qui se consacre surtout aux GIR 1 et 2 en les mobilisant dans leur lit ou fauteuil – en s’occupant des autres patients. Je sais que certaines Agences Régionales de Santé le font. Des gériatres ayant participé au rapport ont pu mettre en place dans leurs structures les recommandations. À l’échelon national, aucune loi n’a révolutionné les choses suite au rapport, mais ce dernier est cité chaque fois qu’est souligné l’importance de faire de l’activité physique à tous les âges de la vie.

Le mot de la fin ?

Il est parfois difficile pour des personnes retraitées de savoir où faire de l’activité physique, comment la faire, comment sera-t-elle encadrée et comment lutter contre la sédentarité. Il faut avouer que dans certaines villes, c’est un petit peu difficile.
Par exemple à Toulouse, il y a des petites rues avec des trottoirs « symboliques » ou alors minuscules ; donc pour une personne de 70 ans à l’équilibre précaire, aller marcher sur un tel trottoir sur lequel il y a une crotte de chien à éviter, c’est assez difficile.
Un effort est nécessaire pour concevoir un environnement urbain dans lequel les gens puissent faire de l’activité physique et lutter facilement contre la sédentarité. Nous sommes une civilisation « accro » à la voiture et sédentaire. Personnellement, je proposerais des solutions « coercitives » ! Par exemple, mettre tout autour des immeubles d’habitation un parc fermé pour que les gens ne puissent garer leur voiture sous leur fenêtre. Il y aurait une allée couverte avec possibilité de fermer les côtés en hiver, pour que les résidents aient au moins 50 mètres ou plus à faire à pied tous les matins pour aller chercher leurs voitures sur un parking ou dans des garages dédiés. Et le soir, revenir à leur logement, où les ascenseurs ne desserviraient pas le premier étage, sauf pour les personnes présentant un handicap physique ou une réduction importante de la mobilité. À mon humble avis, c’est parfois comme cela que l’on oblige les gens à changer de comportement, mais je crains que de telles propositions soient mal acceptées…
Enfin, parmi les personnes âgées, certaines ont un handicap physique, parfois elles sont en fauteuil roulant, parfois elles sont malvoyantes, ont perdu l’audition, certaines ont un handicap mental… Notre monde est peu adapté pour ces personnes. La loi de 2005(13) reconnait que les personnes en situation de handicap sont égales aux autres, c’est-à-dire que la population générale est constituée de personnes dites valides et d’autres en situation de handicap. Nous risquons d’avoir une difficulté concernant l’activité physique pour les personnes vieillissantes en situation de handicap, car j’ai l’impression que peu de choses sont faites pour ce public.
Il reste encore beaucoup à accomplir !
Selon moi, en France, la population valide se divise actuellement en trois grands groupes :
– ceux qui sont devenus « accros » à l’exercice et qui en font en permanence ;
– la population moyenne qui n’est pas vraiment encore dans les recommandations de bonne santé de l’Anses ou de l’OMS ;
– une population qui se sédentarise de façon catastrophique, tout particulièrement les enfants et les adolescents. Les adolescents d’aujourd’hui sont les parents de demain: s’ils sont très sédentaires, les enfants de demain seront encore plus sédentaires qu’aujourd’hui…
Je crois qu’il faut vraiment marteler sans cesse la lutte contre la sédentarité pour que les gens changent de comportement. Les recommandations sur la pratique d’une activité physique doivent être suivies en addition de la lutte contre la sédentarité.

(1)Le muscle strié squelettique, par l’intermédiaire du tendon, se fixe au squelette et permet le mouvement de celui-ci dans une direction bien définie grâce à sa fonction de contraction, volontaire, soumise au contrôle cérébral.
(2) Healthy Brain Aging: Role of Exercise and Physical Activity,Yves Rolland, MD, PhD, Gabor Abellan van Kan, MD, Bruno Vellas, MD, PhD
(3) Anses. Actualisation des repères du PNNS – Révisions des repères relatifs à l’activité physique et à la sédentarité. Avis de l’Anses. Rapport d’expertise collective, Février 2016.
(4) http://www.mangerbouger.fr/PNNS
(5) Galissi V, Praznoczy C, dir. La promotion et la mise en oeuvre de programmes d’activité physique et de lutte contre la sédentarité en milieu professionnel. Clermont-Ferrand : Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité, juin 2017, 50 pages
(6) Préambule à la Constitution de l’Organisation mondiale de la Santé, tel qu’adopté par la Conférence internationale sur la Santé, New York, 19 juin -22 juillet 1946; signé le 22 juillet 1946 par les représentants de 61 Etats. (Actes officiels de l’Organisation mondiale de la Santé, n°. 2, p. 100) et entré en vigueur le 7 avril 1948.
(7) http://www.leparisien.fr/sports/c-est-le-plus-vieux-sportif-du-monde-01-01-2017-6512145.php
(8) Athlète amateur britannique, http://www.sbs.com.au/yourlanguage/punjabi/en/article/2017/03/29/almost-106-years-old-fauja-singh-reveals-secret-his-youthfulness
(9) http://cnosf.franceolympique.com/cnosf/fichiers/File/Medical/Medicosport/medicosport-sante.pdf
(10) Décret n°2016-1990 du 30 décembre 2016 transposant l’article 144 de la Loi No 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé
(11) Physical Activity for Health: What Kind? How Much? How Intense? On Top of What? Powell KE, Paluch AE, Blair SN. Annual Review of Public Health, April 2011, Vol. 32: 349-65
(12) http://www.sports.gouv.fr/IMG/pdf/rapportseniors_m3-3.pdf
(13) La loi n°2005-102 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a été votée le 11 février 2005 (Journal officiel du 12/02/2005).

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